Le Code de déontologie des médias et des journalistes d’Haiti – paraphé le 8 décembre 2011 à Port-au-Prince par des associations du secteur Presse et Medias en Haiti – place la « recherche de la vérité (…) au cœur de la profession journalistique ». Ce qui fait écho à la Charte de Munich (1971) – texte de référence en matière de déontologie du journalisme – pour lequel le premier devoir du journaliste est de « Respecter la vérité, quelles qu’en puissent être les conséquences pour lui-même, et ce, en raison du droit que le public a de connaître la vérité ».
« Rechercher pour le public des informations, les vérifier, les situer dans un contexte, les hiérarchiser et les diffuser est l’une des tâches principales de la presse. Dans cette logique, les faits doivent être rapportés avec impartialité, équilibre et exactitude » stipule l’article 2 titré « Véracité et authenticité des faits » du code de déontologie des médias et des journalistes d’Haïti.
Au fondement même de la pratique du journalisme, la vérification des faits avant publication est une obligation. Le principe est donc de Vérifier d’abord et de diffuser/publier ensuite. La Vérification des faits, traduit littéralement en anglais par « Fact-Cheking », est donc consubstantiel à la pratique du métier de journaliste. Le fact Cheking est alors cet ensemble de pratique et d’outils qui permettent de vérifier différents contenus ou informations (rumeurs, déclarations attribuées à des personnalités, photos, vidéos, notes vocales, etc.).
Les données fournies sur l’état du numérique en Haïti sur le site https://datareportal.com indiquent qu’en janvier 2023 : Il y avait 4,53 millions d’utilisateurs d’Internet en Haïti au début de 2023, alors que la pénétration d’Internet s’élevait à 38,9 pour cent. Haïti comptait 2,10 millions d’utilisateurs de médias sociaux en janvier 2023, soit 18 % de la population totale.
En Haïti, comme ailleurs dans le monde, avec les nouveaux outils médiatiques – (site internet, blogs, logiciels agrégateurs et réseaux sociaux) et la mobilité des appareils de communication (téléphones portables, laptops, tablettes, etc.) les modes de diffusion et de réception de l’information ont significativement évolué. Cette situation favorise la circulation de plus en plus rapide et en grande quantité de contenus produits par une multiplicité d’acteurs d’horizons et d’intérêts différents. A l’ère numérique, chaque internaute, chaque usager de smartphone reçoit, diffuse et rediffuse le plus souvent à la vitesse de l’éclair.
Dans toute cette circulatiion vertigineuse sur internet, on retrouve des éléments de désinformation, de mesinformation autrement dit des contenus mensongers (intentionnels ou pas), des demi-vérités, des théories de complot, des informations sorties de leur contexte, des montages, des hypertrucages, des articles trompeurs, etc.
L’éclatement du paysage médiatique haïtien favorise la mise en place de nouveaux médias. Cependant, les capacités professionnelles ne sont pas toujours au rendez-vous.
De ce constat – et à la faveur de la crise multidimensionnelle que connait le pays depuis quelques bonnes années – Haïti et son écosystème informationnel expérimentent de plus en plus une pollution de l’information empoisonnant l’espace public sur toute une variété de sujets. La chercheuse Claire Wardle, Phd et le chercheur Hossein Derakhshan traduisent cette situation par la notion de « Désordres de l’information » pour ne pas parler de « fake news ». Parmi les différentes formes que peuvent revêtir les désordres de l’information, trois principales sont à retenir : mésinformation, information malveillante et désinformation.
Le rapport sur l’évaluation de l’écosystème d’information en Haïti (octobre 2022 – janvier 2023) réalisé par l’Institut Panos Caraïbes de concert avec Internews et le Cercle de réflexion sur le développement économique (Policité) informe que l’un des résultats majeurs de l’enquête est que « seulement 8,2% des répondants d’ailleurs disent être sûrs de toujours pouvoir distinguer une information juste d’une fausse ».
L’accès à l’information professionnelle de qualité est un enjeu social et démocratique. Il doit être garanti à tout moment aux citoyens et citoyennes. L’information de qualité est produite à travers les médias par des professionnels de l’information que sont les journalistes. Au même titre que la liberté d’opinion et d’expression, la liberté de la presse et le vote de citoyens bien informés, le droit à l’information constitue un élément fondamental d’un système démocratique.
En publiant, diffusant une information vérifiée, le journalisme promeut voire défend le droit du public de connaitre la vérité. Les journalistes ont aussi le devoir d’indiquer au public lorsqu’il est en face d’un mensonge ou toute autre forme de désinformation. Cette dernière étant d’ailleurs une attaque, une menace contre le journalisme professionnel. Lutter contre la diffusion des désordres de l’information fait donc partie intégrante de la mission du journaliste, de nos jours.